LA POESIA DI PATRICIA GUÉNOT – XV/2007
Créations divines
Las de l’éternité dénuée de piment,
Dieu, d’un geste soudain, crée l’homme à son image,
Avant de dédaigner le fruit de ce ratage,
Monolithe vulgaire à l’esprit de dément.
Le Créateur navré fomente un châtiment
Contre cet être froid, aux manières sauvages,
En inventant la femme, une fée au visage
Plus lumineux qu’un astre au bord du firmament.
Le mâle Adam conduit sa princesse au rivage
Du plaisir insolent, sous un ciel sans nuages,
D’où le Maître du monde agonit les amants.
Ève, ardente beauté, réduit en esclavage
Son compagnon conquis par ses yeux de diamant,
Prophètes malicieux d’exquis enlacements.
Cabaret de l’amertume
Au cabaret de l’amertume,
J’entends les sirènes du port
Se mêler aux soyeux accords
D’une musique à plein volume.
Dans le soir qu’assombrit la brume
De ce paysage du Nord,
Une poupée aux cheveux d’or
Accoste un marin en costume.
Tandis que la lune s’endort,
J’écoute un trombone ténor
Jouer la chanson du bitume.
Un goéland prend son essor
Vers le firmament où ses plumes
Chatoient dans le jour qui s’allume.
Visage du bonheur
Sur la photo en noir et blanc,
Ton visage de porcelaine
Affiche une joie souveraine,
Imperméable aux faux-semblants.
Retranché dans l’arrière-plan
Orné d’une lune lointaine,
Le jardin planté de vieux chênes
Cèle nos souvenirs brûlants.
Les diamants de tes yeux s’égrènent
En éclats jaillis par centaines
Devant mon visage tremblant.
Ton sourire gracieux m’entraîne
Sur le chemin étincelant
De notre unisson insolent.
La bonne du curé
Pendant que le curé ânonne longuement
Un sinistre sermon qui plonge les fidèles
Dans un demi-sommeil, sa bonne se fait belle
Pour embraser les sens de son prince charmant.
Loin du prêtre plongé dans le Saint Sacrement,
Sa servante, insensible aux piétés éternelles,
Fredonne en s'épilant galamment les aisselles
Avant de se parer d'un collier de diamants.
Dans l'église, un gamin à la voix de crécelle,
Troublé par les regards d'aguichantes gazelles,
Entonne une chanson qu'il massacre crûment.
Tandis que l'homélie étouffe la chapelle
Sous un voile d'ennui au goût d'enterrement,
La bonne délurée se donne à son amant.
Exquise paresse
Que m’importe l’éclat des palais où s’empressent
Des flots de courtisans aux bras chargés de fleurs
Qu’ils posent sur l’autel des futiles splendeurs,
Avant de regagner leur monde de tristesse !
Que m’importe les traits d’ironie, que m’adressent
Les anciens compagnons de mes tendres bonheurs,
Empêtrés dans les rets d’une course aux honneurs
Barbelée d’un fatras de cupides bassesses !
Que m’importe les cris des oiseaux de malheur,
Prophètes belliqueux du néant fossoyeur,
Avide d’engloutir les frivoles richesses !
Sourde à la frénésie des hommes querelleurs,
Je m’abandonne aux joies d’une exquise paresse
Que mon amie ponctue de soyeuses caresses.
Patricia Guénot