CONTINUIAMO LA PUBBLICAZIONE DELLE POESIE DI PATRICIA GUÉNOT
Prière au sommeil
Sommeil, viens déposer sur mon cœur douloureux
Ton voile velouté au parfum de silence
Afin d'anéantir les fantômes qui dansent
Dans les noires pensées de mon esprit fiévreux.
Fredonne à mon chevet les accords vaporeux
D'un apaisant refrain venu de mon enfance.
Enterre la douleur germée dans ma conscience
Au fond d'un océan de coton ténébreux.
Au lieu de t'envoler dès que le jour se lève,
Accompagne mon âme au rivage des rêves,
Généreux inventeurs de mes nuiteux plaisirs.
Exhorte le soleil à suspendre sa course
Afin que, longuement, je puisse enfin dormir
Dans mon berceau obscur, sous l'œil de la Grande Ourse.
Vieux maussade
Sous les yeux de son chat malade,
Vautré sur le journal du soir,
Le vieux mâche son désespoir
Arrosé de maintes rasades.
Il dîne d'un potage fade,
Suivi d'un âpre café noir,
En écoutant le ciel pleuvoir
Des nuées de larmes maussades.
Il enferme au fond d'un tiroir
Ses photos, afin de surseoir
À la douleur qui le taillade.
Sa vie sur le fil du rasoir
S'effrite en plaques de pelade,
Au fil de sa joie qui s'évade.
Créations divines
Las de l'éternité dénuée de piment,
Dieu, d'un geste soudain, crée l'homme à son image,
Avant de dédaigner le fruit de ce ratage,
Monolithe vulgaire à l'esprit de dément.
Le Créateur navré fomente un châtiment
Contre cet être froid, aux manières sauvages,
En inventant la femme, une fée au visage
Plus lumineux qu'un astre au bord du firmament.
Le mâle Adam conduit sa princesse au rivage
Du plaisir insolent, sous un ciel sans nuages,
D'où le Maître du monde agonit les amants.
éve, ardente beauté, réduit en esclavage
Son compagnon conquis par ses yeux de diamant,
Prophètes malicieux d'exquis enlacements.
Fragments hospitaliers
Dans la calme froideur de l'austère hôpital,
L'infirmière de nuit avance une main fine
Vers la joue d'un vieillard que l'abus de morphine
Enferme dans les rets d'un silence augural.
Sitôt qu'elle aperçoit une aiguille en métal
Devant son bras exsangue, une frêle gamine
Pousse un cri de frayeur en pinçant les narines,
Avant de s'abîmer dans un repos final.
L'interne silencieux ausculte la poitrine
D'un clochard pestilent, victime d'une angine,
Au terme d'un hiver de dénuement total.
Le médecin éteint dans un flot d'insuline
Le chagrin lancinant qui vrille son moral,
Afin de parvenir au sommeil idéal.
Étreintes mortes
Quand je m'envolerai loin du subtil poison
Que le fleuve des ans verse dans les mémoires
Pour éteindre le feu des serments illusoires,
À l'heure où le soupçon assombrit l'horizon ;
Quand je m'évaderai de l'amère prison
De l'ennui qui répand un flot de larmes noires
Sur le cœur des amants pour noyer leur histoire
Dans un boueux torrent de vaines trahisons ;
Quand je délacerai les invisibles chaînes
Du quotidien pétri de silencieuses peines
Qui étouffent les sens dans un puits de glaçons ;
Tu graveras mes vers au milieu de ta porte
Afin de réveiller les insolents frissons
Enterrés dans le lit de nos étreintes mortes
Amazone en bagnole
Ma princesse adorée maltraite ma bagnole,
Une épave rouillée qui fuit de toutes parts
En lâchant un torrent de ronflements geignards
Que ma poupée suspend d'une grande torgnole.
Dans les rues encombrées de l'âpre métropole,
Ma reine farfelue écrase des clébards
Sous les yeux amusés de grappes de moutards
Qui foutent le boxon au sortir de l'école.
Insensible aux jurons de venimeux chauffards,
Elle plante ma caisse sur les grands boulevards,
Le temps d'aller zieuter une paire de grolles.
Ma fringante amazone insulte des tocards
Que la brutalité de sa conduite affole,
Pendant qu'à ses côtés, soufflée, je me gondole.
Patricia Guénot