LA POESIA DI PATRICIA GUÉNOT - XVII/2007

Sapho - Chat mort - Princesse du néant - Carrefour de l’insomnie - Louve amicale - Étreintes mortes

Sapho

L'âme de Sapho, la poète,

Guide le chant de volupté

De mon être que sa beauté

Conduit sur des grèves secrètes.

Sourde aux insolents qui lui prêtent

Un amant dont la cruauté

Assouvit leur virilité,

J'applaudis ses tendres conquêtes.

Grisée par ses mots indomptés,

J'aborde au rivage enchanté

De l'amour féminin en fête.

À l'encre de sa pureté,

Je forme des vers que je jette

Jusqu'aux confins de la planète.

Chat mort

Dans mon esprit erre un chat mort

Dont les miaulements oblitèrent

La paix de mes nuits solitaires

Afin que je perde le nord.

Au fond de ses yeux perlés d’or

Luisent d’insondables mystères

Que ce félin au pas lunaire

Fabrique pendant que je dors.

D’une griffe avide, il lacère

Mes rêveries pour satisfaire

Sa fureur d’animal retors.

Aussitôt que ma main légère

Se risque à caresser son corps,

Ce monstre capricieux me mord.

Princesse du néant

Étrange créature, issue de ma mémoire,

Princesse du néant, tu danses sur le fil

Des ténèbres glacées un boléro subtil

Dont l'insondable joie chasse mes idées noires.

Fille de l'espérance, ange prémonitoire,

Tu quittes mon esprit au mépris du péril

Pour offrir à la nuit ton sibyllin profil

De muette sylphide au visage d'ivoire.

Dans tes yeux cristallins scintillent les lueurs

De diamants insolents, imprégnés du bonheur

Que ton corps élancé trame dans la pénombre.

Sur tes cheveux de jais, les rayons argentés

D'une lune attentive à velouter les ombres

Dessinent un faisceau d'ardentes voluptés.

Carrefour de l’insomnie

Au carrefour de l’insomnie

Naissent des mots complices

De désirs inventés.

Dans la nuit languide,

Le souffle d’un poème

Efface l’empreinte d’un regret.

Le miroir du passé se brise

En fragments équivoques

Dont la douleur s’émousse.

À l’angle des certitudes,

Le chemin de l’errance

Fleurit de sourires tendres.

Sous un rêve avorté

Germe une fleur d’espoir

Au parfum d’imprévu.

Dans le cœur écorché,

Une voix anonyme

Tisse un ruban de joie

Aux couleurs du futur.

Louve amicale

Dès que la nuit étend son aile de noirceur

Sur les humbles maisons de l’antique village,

L’enfant sent naître en lui une voix qui l’engage

À quitter son foyer pour un magique ailleurs.

Dans la campagne obscure, armé de sa candeur,

Il avance sans bruit, quand monte du bocage

Qu’il s’apprête à franchir un hurlement sauvage

Dont le timbre glacé lui déchire le cœur.

Cependant qu’il s’enfuit parmi les pâturages,

Une louve efflanquée surgit sur son passage,

De sorte qu’il se fige, en proie à la terreur.

Lorsque le carnassier lui lèche le visage,

Le gamin épuisé, conquis par sa douceur,

Plonge dans un sommeil aux rêves enchanteurs.

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Étreintes mortes

Quand je m'envolerai loin du subtil poison

Que le fleuve des ans verse dans les mémoires

Pour éteindre le feu des serments illusoires,

À l'heure où le soupçon assombrit l'horizon ;

Quand je m'évaderai de l'amère prison

De l'ennui qui répand un flot de larmes noires

Sur le cœur des amants pour noyer leur histoire

Dans un boueux torrent de vaines trahisons ;

Quand je délacerai les invisibles chaînes

Du quotidien pétri de silencieuses peines

Qui étouffent les sens dans un puits de glaçons ;

Tu graveras mes vers au milieu de ta porte

Afin de réveiller les insolents frissons

Enterrés dans le lit de nos étreintes mortes.

Patricia Guénot

Patricia Guénot
Società