LA POESIA DI PATRICIA GUÉNOT (XV/
Bal des vampires
Fantômes sulfureux armés de lourdes chaînes
Dont le cliquètement forme un chant sépulcral
Clamant la cruauté des puissances du mal,
Courez au rendez-vous de la mort souveraine.
Loups-garous affamés aux canines obscènes,
Partageant les lambeaux d'un chétif animal,
Vampires élancés en costume de bal,
Dansez dans le royaume où l'enfer vous emmène.
Dans son palais illustre au parfum d'au-delà,
Prosternez vous devant le Comte Dracula,
Sous le brûlant regard de riches candélabres.
Dès la fête achevée, aux lueurs du matin,
Remisez au tombeau vos visages macabres,
Tordus par la fureur de vos odieux instincts.
Armée cruelle
Pendant que l'adjudant assène à la bleusaille
Un laïus assommant sur l'art de guerroyer,
Le fougueux lieutenant trompe sur l'oreiller
Le ténébreux chagrin dont les crocs le tenaillent.
Le général d'armée exhibe ses médailles
Au colonel qui noie ses regrets coutumiers
Dans un whisky médiocre, habile à se frayer
Un chemin de douleur au creux de ses entrailles.
L'inflexible sergent hurle à s'égosiller
Contre un groupe bruyant de soldats débraillés,
Qu'il envoie trépasser sur le champ de bataille.
Une frêle recrue au visage émacié
Annonce, d'une voix que l'émotion éraille,
Son avenir brisé par une courte paille.
Louve amicale
Dès que la nuit étend son aile de noirceur
Sur les humbles maisons de l'antique village,
L'enfant sent naître en lui une voix qui l'engage
À quitter son foyer pour un magique ailleurs.
Dans la campagne obscure, armé de sa candeur,
Il avance sans bruit, quand monte du bocage
Qu'il s'apprête à franchir un hurlement sauvage
Dont le timbre glacé lui déchire le cœur.
Cependant qu'il s'enfuit parmi les pâturages,
Une louve efflanquée surgit sur son passage,
De sorte qu'il se fige, en proie à la terreur.
Lorsque le carnassier lui lèche le visage,
Le gamin épuisé, conquis par sa douceur,
Plonge dans un sommeil aux rêves enchanteurs.
Pensées d'une rose
Reine de vos jardins, de teinte rouge ou blanche,
Au gré des émotions, je change de couleur.
Des perles de rosée exaltent ma splendeur.
Ma robe de velours embellit vos dimanches.
Rose dans un bouquet, mes effluves s'épanchent
En essence de joie qui éloigne les pleurs.
Mes pétales soyeux, mon habit de douceur,
Raccommodent les cœurs, l'amour prend sa revanche.
Vous me donnez la mort pour un tendre motif.
Qu'importe si demain j'offre à un vent furtif
Les restes de mon corps dépouillé de sa sève.
Victime sacrifiée, troublée par votre émoi,
J'assiste à vos ébats dès que le jour s'achève.
Pourvu que dans le ciel Dieu prenne soin de moi.
Patricia Guénot