LA POESIA DI PATRICIA GUÉNOT – XI/2007
Rêves voluptueux
Lorsque Diane s'évade au pays de ses rêves,
Un vent de solitude à la griffe de fer
Ensable mon esprit au centre du désert
Où j'attends sombrement que ma belle se lève.
Dans mon cœur écorché par la pointe du glaive
De mon soupçon germé de souvenirs amers,
Un tourbillon glacé au parfum de l'hiver
Creuse un puits d'où s'échappe une menace brève.
Les yeux clos de ma fée me tiennent à l'écart
Du jardin chatoyant où coule le nectar
Des baisers échangés dans l'écrin de ses songes.
Le soleil matinal qui danse sur sa peau
Efface mes pensées dont l'âpreté me ronge
Quand ma reine m'oublie dans son douillet repos.
La passante
Dans la rue obscurcie, une femme s'avance
À petits pas discrets vers le grand boulevard
Où son manteau grisâtre et son morne foulard
Disparaîtront bientôt parmi la foule immense.
De son masque fripé s'échappent des souffrances,
Un amour dévasté qui ternit son regard
D'un voile de regrets noyés dans le cafard
Au rythme de ses bras qui marquent la cadence.
Solitaire blessée par d'âpres cruautés,
J'accorde ma tristesse à sa sombre beauté
Dans un rêve furtif conjuguant nos visages.
Sourde à mes songeries, la passante s'enfuit
Dans la ville endormie jusqu'au lointain rivage
Où d'anciens souvenirs illuminent sa nuit.
Lune tendre
Accrochée dans un ciel étouffant de tristesse,
La lune silencieuse étend d'aigres lueurs
Sur la Terre souillée par les tirs fossoyeurs
Des humains insoucieux des champêtres richesses.
Lassée d'illuminer les soldats qui ne cessent
De changer l'univers en écheveau d'horreurs,
L'astre de nuit déploie ses rayons enchanteurs
Sur le corps endormi d'une exquise princesse.
Tandis que les guerriers déplorent la noirceur
De la voûte où grandit le spectre de la peur,
La belle se réjouit des lunaires caresses.
Le soleil matinal, insensible au bonheur
De la fée solitaire, odieusement s'empresse
D'incendier le berceau des nocturnes tendresses.
Liberté sanguinaire
La belle a noyé son mari
Dans l’eau du bain de la gamine
Pour contrer les envies câlines
Cachées sous son air ahuri.
Dès que son amant l’a appris,
Il a fait chanter la coquine.
La belle a noyé son mari
Dans l’eau du bain de la gamine.
À l’aide d’un fin bistouri,
La veuve a tranché la bobine
De la venimeuse vermine.
La liberté se paie bon prix.
La belle a noyé son mari.
Chat cajoleur
J’abrite en mon esprit un animal charmant
Dont la grâce embellit mes soirées solitaires,
Lourdes de souvenirs que sa patte légère
Chasse dans les recoins de mon appartement.
Dès que le ciel revêt de nocturnes diamants
Zélés à enflammer son regard de panthère,
Ce chat vient déchirer mes cauchemars polaires
D’une voix qui s’envole en tendres miaulements.
D’une griffe acérée, prestement, il lacère
Les échos sibyllins de ma tristesse amère,
Avant de me combler de soyeux frôlements.
Sur mon cœur apaisé, cajoleur, il se serre
En berçant mon sommeil de son ronronnement,
Pendant qu’un gai soleil s’avance au firmament.
Amazone en bagnole
Ma princesse adorée maltraite ma bagnole,
Une épave rouillée qui fuit de toutes parts
En lâchant un torrent de ronflements geignards
Que ma poupée suspend d’une grande torgnole.
Dans les rues encombrées de l’âpre métropole,
Ma reine farfelue écrase des clébards
Sous les yeux amusés de grappes de moutards
Qui foutent le boxon au sortir de l’école.
Insensible aux jurons de venimeux chauffards,
Elle plante ma caisse sur les grands boulevards,
Le temps d’aller zieuter une paire de grolles.
Ma fringante amazone insulte des tocards
Que la brutalité de sa conduite affole,
Pendant qu’à ses côtés, soufflée, je me gondole.
Patricia Guénot